Le web, c’est fini ? Plongée dans la Dead Internet Theory ou Théorie de l’Internet Mort qui postule que l’humain va disparaître des échanges en ligne d’ici quelques années

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La “Dead Internet Theory”, une théorie conspirationniste née dans les années 2010, refait surface depuis un tweet du PDG d’OpenAI, Sam Altman, qui dit s’inquiéter de l’avenir d’Internet. D’ici 2026, les contenus produits par les humains sur le web pourraient tomber à 10 % selon un rapport d’Europol.

Le web est-il mort ? Le cofondateur d’OpenAI, Sam Altman, s’inquiète désormais de la “Dead Internet Theory” ou théorie de l’Internet mort en français. “Je n’ai jamais pris la théorie de l’Internet mort au sérieux, mais il semble qu’il y a désormais beaucoup de comptes Twitter gérés par des LLM” a t-il estimé sur le réseau social X le 4 septembre 2025, en référence aux modèles d’intelligence artificielle capables de générer du texte.

Si les internautes n’ont pas tardé à souligner l’ironie du message publié par l’homme derrière le robot conversationnel ChatGPT, lui-même grand partisan de l’IA, Sam Altman semble s’en prendre à la gestion de X. Elon Musk, le détenteur du réseau social, peine en effet à lutter contre la multiplication des bots sur son site. Selon une étude menée par l’université de Caroline du Sud aux États-Unis, 9 à 15 % des comptes sur l’application seraient automatisés, soit près de 50 millions de profils basés sur des LLM. Est-ce à dire que la théorie du complot s’avère finalement prophétique ?

Formulée au milieu des années 2010 par un utilisateur du forum de discussion controversé 4chan, la Dead Internet Theory avance que la majorité de l’activité sur le web est générée par des robots plutôt que par des humains. “Les premiers partisans de cette théorie ont constaté qu’une grande partie d’Internet n’était plus aussi dynamique ni aussi authentique qu’à ses débuts, où les blogs créés par les utilisateurs, les forums spécialisés et les sites web personnels créaient des espaces d’interaction organique” explique le chercheur Prathamesh Muzumdar dans un article paru dans l’Asian Journal of Research In Computer Science en janvier. 

Selon les adeptes de cette théorie, cette perte de dynamisme s’expliquerait par la multiplication de contenus générés sur Internet. La nature organique du web aurait par conséquent été remplacée par un écosystème dominé par des interactions factices propulsées par les gouvernements à des fins propagandistes et financières. Les sympathisants de la Dead Internet Theory situent la date de mort d’Internet à 2016.

Cette hypothèse, qui pouvait paraître saugrenue et spéculative à sa naissance semble aujourd’hui renforcée par la démocratisation de l’IA générative et les contenus générés qui pullulent notamment sur les réseaux sociaux. Pour Yoshija Walter, professeur à la Haute école spécialisée Kalaidos, en Suisse, cette tendance est incarnée par “la gestion complète par l’IA des réseaux des influenceurs” proposée par Meta. La multinationale américaine, qui vient de lancer un réseau social basé sur les vidéos par IA, qui détient Facebook et Instagram permet depuis 2024 aux influenceurs de créer une version IA d’eux-mêmes pour répondre à toutes les questions de leurs followers en privé. Cette nouvelle fonctionnalité “marque une convergence inquiétante d’espaces autrefois dédiés à l’expression humaine vers du consumérisme et de l’artificialité” signale Yoshija Walter dans la revue IA & Society.

C’est sans compter “les algorithmes [qui] amplifient les contenus polarisants ou viraux, privilégiant souvent le contenu artificiel ou généré par des robots au détriment des contributions authentiques des utilisateurs” pointe Prathamesh Muzumdar avant de préciser que “les réseaux adoptent de plus en plus des stratégies de production massive de contenus pour maximiser l’engagement des utilisateurs et capitaliser” dessus afin de s’enrichir. Les images générées de “Jésus Crevette” qui ont pullulé sur Facebook début 2024 en sont l’illustration parfaite. Derrière ces images, une armée de petits entrepreneurs du web basés en Inde ont fait de l’attention des internautes leur matière première pour amasser du cash.

Les internautes pro-russes contribuent aussi à alimenter la théorie de l’internet mort : “une campagne de propagande sur X a utilisé plus de 10 000 comptes robotisés pour publier des dizaines de milliers de messages pro-Kremlin attribués à des célébrités américaines et européennes qui semblent soutenir la guerre en cours contre l’Ukraine” relèvent Jake Renzella et Vlada Rozova, universitaires australiens dans le média de recherche The Conversation.

Si un rapport de l’agence européenne de police Europol soulignait en 2022 que jusqu’à 90 % du contenu en ligne pourrait être généré synthétiquement d’ici 2026, Yoshija Walter appelle à “prioriser la maîtrise du numérique, développer des outils de détection de l’IA et établir des normes éthiques pour son utilisation” pour préserver la valeur du web, initialement pensé pour “nous aider à trouver des informations pertinentes et à rester connectés les uns aux autres.” À défaut, le web pourrait bien se transformer en gigantesque miroir sans reflet.

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