Octobre 2025 a été un mois animé sur le terrain nucléaire. La France vient à ce propos d’annoncer la mise en service opérationnel d’un nouveau missile nucléaire pour ses sous-marins. Et la nouvelle génération de ce missile est dès à présent en chantier.
La modernisation de l’outil militaire en France ne bénéficie pas seulement aux forces conventionnelles. Elle profite également à son armement nucléaire. Une illustration très nette de cet effort d’actualisation des moyens est apparue ce mardi 28 octobre 2025, justement, avec l’annonce de la mise en service opérationnel du M51.3.
Ce missile est précisément le troisième de sa génération, après les M51.1 et M51.2. Développé et déployé par ArianeGroup au terme d’un chantier qui a duré une dizaine d’années, le M51.3 constitue une « étape majeure dans la modernisation de la composante océanique de la dissuasion nucléaire française », relève l’état-major.
Nouveau missile, nouvelle tête nucléaire
Le missile M51.3, comme les précédentes versions, embarquera à bord des quatre sous-marins lanceurs d’engins (SNLE) que compte la Marine nationale. Chaque SNLE emporte 16 missiles M51, et chaque missile compte plusieurs têtes nucléaires. Le M51.3 permet d’ailleurs d’en activer une nouvelle, appelée tête nucléaire océanique 2 (TNO-2).
L’ensemble, pointe le ministère des Armées, donne à la France un missile de type mer-sol balistique stratégique qui sera « plus performant en termes de portée, de précision et de capacité de pénétration ». Surtout, il « pérennise la crédibilité de la composante océanique face à l’évolution des défenses anti-missiles adverses ».
Comme le pointe Fabien Mandon, chef d’état-major des armées, la France ne modernise pas seulement sa composante océanique. L’autre jambe de la dissuasion nucléaire française, à savoir la force aérienne stratégique, prépare aussi l’avenir avec la préparation d’un missile nucléaire hypersonique : l’Air-Sol Nucléaire de Quatrième Génération (ASN4G).

Avant de prononcer la mise en service opérationnel du M51.3, celui-ci a été testé en conditions réelles en novembre 2023 — évidemment, sans aucune charge nucléaire à bord. Tiré par la direction générale de l’armement depuis son site des Landes, le missile a ensuite survolé l’océan Atlantique et a fini sa course à des centaines de kilomètres de toute côte.
Les caractéristiques et performances du missile comme de la la TNO-2 sont tenues secrètes. On suppose que le missile peut franchir plusieurs milliers de km (peut-être entre 9 et 11 000), avec un apogée dans l’espace, jusqu’à 2 000 km d’altitude. L’engin, ensuite, retombe sur Terre à une vitesse jaugée à 20 000 km/h (Mach 20). Une rentrée hypersonique.
Quant au feu nucléaire, une seule tête nucléaire TN-2 aurait une puissance explosive de 100 kilotonnes, soit dix fois celle de Little Boy, la bombe qui a rasé Hiroshima en 1945. Un seul missile M51 contient donc potentiellement cent fois cette puissance et un seul SNLE, avec ses 16 missiles, un total de 16 mégatonnes. Et il y a 4 SNLE.
Un mois d’octobre très « nucléaire »
Coïncidence ou non du calendrier, l’annonce du déploiement du M51.3 (qui se fera progressivement, au rythme des arrêts techniques des quatre SNLE) survient au moment où la Russie a fait parler d’elle avec un test d’un missile de croisière 9M730 Bourevestnik. Sa particularité réside dans sa propulsion, qui est nucléaire.
Le missile, qui peut emporter une charge nucléaire, aurait parcouru 14 000 km lors d’un récent test, à une vitesse subsonique (c’est-à-dire sous le mur du son). Mais les spécialistes tempèrent la portée de l’annonce de Moscou : le missil n’est pas opérationnel et n’a pas encore de doctrine d’emploi. Il n’a pas non plus d’infrastructure permettant son déploiement.
La communication du Kremlin sur le 9M730 Bourevestnik peut relever du « signalement stratégique » à destination des autres États nucléaires, comme d’ailleurs l’annonce française du M51.3. Octobre aura été très dense sur ce terrain, avec des exercices nucléaires très suivis : Poker, Steadfast Noon, Global Thunder, Grom…
Et parce que l’horizon d’un monde sans armes nucléaires est encore très lointain, la France a d’ores et déjà lancé le chantier du M51.4. Entrée dans les forces prévues vers 2035, avec la prochaine génération des SNLE.
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